Putain de Nelly Arcan

Quatrième de couverture : Cachée derrière les rideaux de sa chambre, une prostituée patiente entre deux clients. L’attente se nourrit du souvenir : une famille dévote, une mère absente et un père distrait. Et parfois la jouissance éprouvée avec ces hommes auxquels elle fait l’amour, ces hommes qu’elle déteste peut-être autant qu’elle-même.

Avis : Il serait tentant, dès les premières lignes, et sous prétexte que le livre est une autofiction, d’assimiler totalement l’auteur et son personnage. Surtout quand le suicide de l’auteur en 2009 peut être interprété comme une validation. Ce mal-être du personnage, son penchant suicidaire, c’était forcément celui de l’auteur puisqu’elle a fini par se pendre. Cette mort, d’ailleurs, est-ce vraiment une si grande surprise quand on a lu ce livre ? Tout doit donc être vrai dans Putain. Sauf qu’il s’agit bien d’une autofiction qui mêle vrai et faux sans que le lecteur puisse faire le tri. Et c’est précisément parce que le tri est impossible que l’ouvrage est aussi percutant. Certes, Nelly Arcan a fait des études de lettres, elle a été escorte, elle a toujours eu des pensées suicidaires – elles hantent toute son œuvre, elle s’est nourrie d’elle-même pour écrire, mais elle n’a notamment jamais eu de sœur dont la mort prématurée aurait plongé sa mère dans la dépression. Il s’agit bien là d’un ouvrage littéraire travaillé, notamment au niveau du style, aussi pénible soit-il. Les phrases à rallonge n’en finissent plus, très vite les répétitions tournent à l’obsession. Son père, sa mère, le suicide, son psy, les putasseries, le viol, la mort, l’inéluctable vieillissement des corps et des âmes, les femmes, les clients, la détestation d’elle-même et ce complexe d’Œdipe qui ne dit jamais son nom. Tout tourne en boucle, encore et encore, parfois avec les mêmes phrases, parfois avec des variantes, mais encore et toujours les mêmes thèmes, jusqu’à la nausée. C’est une écriture littéralement vomie sur le papier, qui prend aux tripes et qui ne les lâche pas avant le point final. L’impression de mal-être est palpable, le besoin d’en finir est prégnant. Putain est un livre qu’on abandonne vite ou qu’on finit vite parce qu’il y a quelque chose d’insupportable dedans. Il n’a rien d’essentiel, on peut ne jamais le lire, on peut vivre sans, mais il reste une expérience de lecture qui donne le tournis et marque longtemps.

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