Bron / Broen

Suite à l’extinction soudaine de toutes ses lumières, le pont Øresund / Öresund qui fait la jonction entre Malmö en Suède à Copenhague au Danemark se retrouve totalement plongé dans le noir. Quand les lampes se rallument, un corps est retrouvé exactement au milieu, sur la ligne fictive qui sert de frontière entre les deux pays. La macabre découverte va les forcer à coopérer pour élucider le crime. Ainsi débute une enquête casse-tête qui tiendra en haleine jusqu’au dixième et ultime épisode.

Bron / Broen, dont la dualité du titre reflète bien celle de la série en elle-même, est la dernière petite merveille venue de Scandinavie. C’est également la première collaboration de ce type entre la Suède et le Danemark. Le premier obstacle que va naturellement rencontrer le spectateur étranger à ses deux contrées est la barrière de la langue. Car oui, il est vivement conseillé de regarder la série en version originale sous-titrée. Non seulement pour une question d’immersion, mais aussi parce que certains passages ne fonctionnent tout simplement pas une fois traduits en une seule langue. Bien sûr, à moins de connaître soit le suédois, soit le danois, il est difficile de savoir comment s’effectue la communication entre les deux pays (quoique, au bout de 10 épisodes, l’oreille attentive a eu le temps de se former un peu). Par contre, les commentaires et réactions des différents protagonistes indiquent assez clairement qu’il y a eu une incompréhension ou un jeu de mots et le spectateur finira par sourire bien malgré lui, même si ça reste parfois aussi obscur que la blague du rødgrød med fløde du premier épisode (phrase dont la prononciation en danois est tellement spécifique qu’elle servait à détecter les Allemands infiltrés pendant la guerre.)

La dualité se prolonge avec le couple d’enquêteurs Saga Norén / Martin Rohde. Elle, Suédoise, ne sait se présenter qu’en disant « Saga Norén, Länskrim Malmö » (la petite citation qui peut trotter dans la tête très longtemps) et a la particularité d’être atteinte d’une forme d’autisme proche du syndrome d’Asperger qui la rend aussi efficace dans son travail qu’inadaptée socialement quand il s’agit de compatir, mentir et s’autocensurer. Lui, Danois, est plus âgé, a plus de recul, plus de tact, mais éprouve quelques difficultés à gérer sa vie de famille. Son petit regard brillant et amusé, qui en dit long sur ce qu’il pense intérieurement des réactions et réponses totalement inattendues et inadéquates de sa collègue, apportera bien souvent une touche d’humour salvatrice à cette enquête particulièrement retorse. Passant par des phases d’irritation, d’incompréhension, de curiosité, de colère et de tendresse, leur collaboration se révélera payante aussi bien professionnellement que personnellement. Outre l’investigation en elle-même, leur relation est véritablement le moteur de la série qui pousse à avancer pour découvrir ce que le sort leur réserve. Pour le pire et le meilleur…

L’affaire, qui ne s’arrête pas au crime du premier épisode, n’a de cesse de se complexifier au fil des heures. C’est rapidement l’escalade avec enlèvements, chantage, revendications et de nouveaux meurtres. Impossible de deviner où les scénaristes veulent vraiment en venir. Un instant, la piste d’un plan diabolique visant à ouvrir les yeux de l’opinion publique sur les maux du pays se dessine. La minute d’après, c’est celle d’une vengeance contre de grands groupes financiers. À moins qu’il ne s’agisse d’une façon de condamner la surmédiatisation sans âme ni conscience de ces mêmes événements dont se gavent avidement les foules. Il y a d’ailleurs souvent un journaliste impliqué dans ce type d’histoire, et Bron / Broen n’échappe pas à la règle. Les réelles motivations du tueur resteront longtemps un immense point d’interrogation ; au même titre que les nombreux personnages secondaires dont l’utilité dans l’histoire ne saute pas aux yeux. La rencontre de tous ces éléments donnera lieu à une scène excitante à souhait où toutes les pièces du puzzle se mettront finalement en place. Une juste récompense à une attente parfois un peu longue.

Un dernier mot pour conclure : impossible de ne pas mentionner l’esthétique visuelle particulière de Bron / Broen, notamment grâce à l’architecture froide de la Scandinavie sublimée par des plans nocturnes de transition aux tons sépia et verts somptueux. Sans oublier bien sûr ce générique d’ouverture entêtant qui défile au son de la chanson Hollow Talk du groupe danois Choir of Young Believers. Toute une ambiance résumée en quelques images envoûtantes.

Disponible actuellement uniquement en import avec sous-titres anglais, la série ne semble pas encore avoir trouvé preneur du côté des chaînes françaises. Seul Canal + serait intéressé non pas pour la diffuser, mais pour produire un remake en partenariat avec l’anglais Sky Atlantic. Faute de pont entre les deux pays, c’est le tunnel sous La Manche qui pourrait devenir le point de départ de l’affaire. Ce qui risque d’être beaucoup moins pratique pour faire la navette. La saison 2 de la version nordique est quant à elle d’ores et déjà programmée pour fin 2013.

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