Avis : Tôkyô est mon jardin (Boilet/Peeters)

Tôkyô est mon jardin

Allez j’avoue, j’y allais un peu à reculons en me disant que de toute façon si je n’avais rien à dire et bien je n’écrirais rien dessus. Parce que quelque part ça m’énerve un peu l’aspect BD d’auteur versus BD du peuple et nous on est mieux et on est plus intelligent. Si vous êtes comme nous, viendez nous rejoindre et crachez sur la BD populaire qui pue. Bon j’exagère un peu mais le côté élitiste de LA manga ne me plait pas beaucoup. Du coup, Boilet des fois j’ai du mal à me faire une opinion sur le personnage en lui-même. Certes, ça fait déjà un paquet d’année qu’il œuvre pour montrer que les manga, ça n’est pas que pour les djeunz boutonneux et il vient d’ailleurs d’amener des œuvres rares et intéressantes sur le marché français via son poste de directeur de collection chez Casterman mais il n’y a pas que moi que le discours pour vendre Sakka a quelque peu rebutée. Enfin bon passons.

Tokyo est mon Jardin donc. Ca fait bien 1 an qu’il est sur ma pile de lecture en attente du bon moment et le bon moment est venu aujourd’hui en faisant la fiche pour CinemAsie. Je devais vérifier l’année de première publication et finalement je me suis dit que c’était peut-être l’occasion de le lire. Et ben j’avoue, j’ai vraiment aimé.

Petite remise dans le contexte. M.David Martin vit au Japon depuis deux ans où il est censé représenter les Cognac Heurault. Sauf que Heurault ça ne sonne pas comme Napoléon et que c’est rapidement l’impasse. Du coup David Martin en profite pour explorer Tôkyô, ses us et coutumes, ses kanji, ses mannequins et grossistes en poisson. L’histoire commence avec le largage tout en cris et fureur de David Martin par sa copine japonaise qui ne supporte plus qu’il squatte sa ligne téléphonique pour appeler la France. En plus le grand patron débarque dans deux semaines pour inspecter le travail de son expat. Le temps est donc loin d’être au beau fixe et c’est bientôt la saison des tremblements de Terre…

Je crois que ce qui m’avait rebuté au premier abord c’est le dessin auquel je n’accroche pas du tout. Surtout au niveau des visages pour lesquels l’expressivité est assez mal rendue et les traits trop forcés. Par contre tout ce qui est attitudes corporelles, c’est plutôt bien vu. On ne peut pas dire n’ont plus qu’il s’agisse d’une BD carte postale qui nous ballade dans tous les hauts lieux connus de la capitale. Au contraire, les lieux sont généralement « anonymes » mais suffisamment typiques pour être dépaysants. Ce qui joue aussi beaucoup sur l’ambiance c’est l’omniprésence du japonais, non seulement dans le décor mais aussi dans les bulles. Soit le japonais est sous-titré en bas de case, soit le texte en français est encadré par des petits kanji pour indiquer que ça parle toujours japonais. L’idée est bonne et on est rapidement immergé dans la langue même si on ne sait pas la lire. En passant, il est fait référence à un livre d’Yves Maniette (qu’on entre-aperçoit au détour d’une case). Je note la référence ici pour moi plus tard et pour ceux que ça intéresserait : Les kanjis dans la tête (ISBN: 2-9512557-0-5). Il est actuellement épuisé.

Je dois dire que j’ai eu un peu de mal avec la relation entre David Martin et sa Kimié au début. Je trouvais ça assez froid surtout dans leurs moments les plus chauds. Bon là n’est pas ce qui fait le charme de l’œuvre de toute façon. Les gros plus c’est le jeu des interactions entre les personnages de cultures différentes et la façon dont chacun appréhende l’autre et son environnement. Le personnage de David Martin est d’ailleurs intéressant en cela qu’il est à cheval entre la France et le Japon. Il parle les deux langues, bosse tôt le matin avec des Japonais pour livrer les poissons et au bout de 2 ans de vie sur place a engrangé beaucoup d’informations sur la culture et la société qu’il peut ensuite retranscrire à sa manière à son patron quand celui-ci arrive (en déformant un peu volontairement par moment). C’est finalement ce que fait la BD en elle-même dans une certaine mesure. Puis ça ne manque pas d’humour en plus de ça. Le coup de la « performance » chez Johnny Walker m’a fait repenser à la scène avec la call girl dans Lost in translation. Le truc où on se dit « oh nan… » mentalement. Puis les comparaisons avec les acteurs français connus là-bas sont toujours marrantes. « Vous êtes américain ? – non français. -Ah oui vous ressemblez à Jean-Marc Barr (ou Jean Marais ou Delon) » Tellement cliché 🙂 Même si on ne voit pas trop où va aller le scénario au début : simples moments de vie « sans queue ni tête » ou construction d’une vraie histoire avec une vraie évolution de la situation des personnages, ça reste très plaisant à lire et quand une simple bouteille de Cognac oubliée dans le métro fait un beau pied de nez à notre M.Martin, le côté léger de l’histoire prend le dessus. Je n’avais pas vraiment apprécié Mariko Parade mais là franchement c’est une bonne surprise.

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