Je pense donc je jouis – Philosophie du cul de Sylvain Bosselet

jepense Présentation de l’éditeur : Dans leur recherche de la vérité et du bonheur, les philosophes classiques ont passé sous silence l’une des facettes les plus importantes de notre vie : la sexualité.
L’auteur répare cette erreur en interrogeant ce champ de connaissances et de pratiques : Qu’est-ce qu’un « bon » coït ? Qu’est-ce qu’un « beau » cul ? Qu’est-ce qu’un acte sexuel « légal » ? Qu’est-ce qui est universellement « vrai » en sexualité ? Qui est « pervers » ? Le cul représente-t-il un plaisir momentané ou pourrait-il incarner un fondement du bonheur ?
Sur des exemples concrets, Sylvain Bosselet déconstruit les a priori qui entravent notre liberté et nuisent au bonheur sexuel. Il recherche des jalons pour une philosophie du cul.

Avis : Vaste sujet qu’est celui de la sexualité. Le grand nombre d’articles, de séries et de films, de sondages et d’études abordant la question est là pour en témoigner. Certains sexe-blogueurs en ont même fait leur fonds de commerce avec succès en en parlant avec plus ou moins de sérieux. Alors, pourquoi ne pas tenter l’approche philosophique après tout ? L’auteur initie d’emblée la réflexion grâce à trois questions : Quelle pratique sexuelle saura nous rendre heureux ? La réponse vaudra-t-elle pour tous ? Le cul représente-t-il un plaisir momentané ou pourrait-il incarner le fondement de tout bonheur ? La quête du bonheur et l’universalité du plaisir sexuel donc. Si vous avez déjà réfléchi à ces questions, que vous avez déjà des éléments de réponse construits à proposer, voire que vous avez déjà basculé dans l’épicurisme, alors ce livre ne vous est probablement pas adressé et sa lecture vous paraîtra un peu fastidieuse.

Le public cible est davantage celui encore soumis à la pression des préjugés, du qu’en-dira-t-on, des dictats sociaux et religieux persistants, celui qui ne voit pas que lui sont imposées des normes qui n’ont plus lieu d’être. Surtout en matière de sexualité. Le but de l’auteur est donc de faire voler en éclats les certitudes et préconceptions de son lectorat afin de l’amener à (re)penser sa sexualité par lui-même et, par là même, d’arrêter de juger celle des autres. Le débat d’idées visant à ouvrir les esprits s’appuie notamment sur les apports en la matière de la sociologie, de l’ethnologie, de la biologie et de la psychologie. Cette dernière est d’ailleurs la seconde spécialité de l’auteur et son influence se fait largement plus sentir que celle de la philosophie dans le livre. Mais passons, le but est avant tout de faire réfléchir. Bosselet se révèle être un militant de l’amour libre qui s’amuse à démystifier certaines pratiques, à faire bouger les lignes en soulevant moult questions, sans forcément donner les réponses puisqu’il ne peut y en avoir une et une seule (Où serait l’invitation à la réflexion et l’autoréflexion sinon ?), et interroge même sur des sujets qui font mal par où ils passent. Sur celui de la pédophilie en particulier, il a le mérite de présenter les choses avec une logique assez imparable qui force littéralement à reconsidérer le « problème. » Ou comment se retrouver avec un nœud gordien dans le cerveau et l’incapacité absolue de le trancher. À défaut, ça aide à revisiter avec un regard différent un passage délicat d’un autre ouvrage critiqué en ces lieux.

La démarche générale est donc honorable, même si le livre ne sera probablement pas lu par ceux qui sont les plus concernés et à qui cela ferait le plus de bien. Le seul petit reproche qui pourrait être fait à l’auteur, c’est d’être un homme qui oublie parfois qu’il s’adresse aussi à des femmes. Malgré quelques témoignages du deuxième sexe, il parle naturellement plus de la sexualité masculine (exemple du voyeurisme avec la voisine page 40, de la pornographie inadaptée aux femmes page 231) et c’est à la lectrice de transposer. C’est également sous-estimer la complexité des rouages de la sexualité féminine et ses fantasmes que de dire qu’une femme ne peut pas coucher sans sentiments et qu’elle a besoin de gynopornographie à base de « dimensions sentimentale, esthétique, sensuelle, et peut-être un jour, tactile. » À croire que l’homme a le monopole de la pulsion sexuelle et la femme celui de la délicatesse…

Alors, de grâce, jetez donc à la poubelle tous ces magazines qui vous promettent le plus bel orgasme de votre vie, vous imposent l’épilation intégrale, calculent votre âge sexuel, vous expliquent comment choper à coup sûr et pourquoi sucer le premier soir n’est pas tromper tout en vous faisant miroiter le bonheur absolu qu’est un mariage en blanc, un chien et des gosses. Bref, qui essayent de normer quelque chose qui ne peut et ne doit pas l’être : l’épanouissement personnel. Et pourquoi ne pas travailler à atteindre celui-ci à travers le cul. Comme le dit l’auteur lui-même : « Nous sommes tous des philosophes du cul ! », à condition bien sûr d’avoir compris qu’une sexualité libre, éclairée, consentie, dans le respect de l’autre, est aussi une philosophie de vie qui peut apporter beaucoup. Car il y a finalement autant de philosophies du cul, donc de philosophies de vie, que de variations en matière de sexualité.


Si la « nymphomanie » caractérise une femme dont le comportement sexuel est similaire à celui d’un homme, pourquoi ne pas nommer la réciproque ? (p39)

Fondamentalement, le désir s’avère multiforme, fluctuant, surprenant… La société, notamment à travers ses institutions et l’éducation, nous oblige à rabattre les innombrables gouttes de pluie du désir vers des lits artificiels, jusqu’à ce canal à grand gabarit que représente le sacro-saint couple (marié de préférence) – cette peau de chagrin de notre potentiel sensuel. (p41)

Pouvons-nous sortir du mainstream ? Pouvons-nous construire notre propre désir, plus indépendant, original, nouveau, et peut-être même… libre ? Le devons-nous ? (p43)

Les religions constituent un excellent indicateur pour savoir quoi faire en cul. Deux cas se présentent : soit elles divergent, soit elles convergent.
Quand elles se contredisent entre elles sur un point précis, nous pouvons en déduire que l’homme demeure libre de choisir. Nous pouvons décider librement le nombre de partenaires, de nous marier ou pas, de divorcer ou non, etc.
Quand les religions se montrent unanimes, nous savons d’avance que nous devrions envisager l’option opposée. Nous savons d’emblée que nous pouvons avorter, utiliser des préservatifs, tromper notre partenaire, assister la procréation, encourager la prostitution, pratiquer la sodomie, aimer nos amies les bêtes, etc. (p116-117)

Certes, athéisme et libertinage font bon ménage, mais à notre époque insulter la religion ne constitue plus une source d’excitation – sauf pour pervertir une prude croyante ! (p187-188)

Les normes se révèlent relatives, susceptibles d’évoluer, et en un mot… risibles. Pour le dire plus crûment : aucun acte absolument (a)normal n’existe en soi. La norme relève de l’imaginaire collectif, intégré dans le surmoi.
Telle est la véritable « Bonne nouvelle » : il n’y a pas d’actes sexuels anormaux ! Les perversions n’existent pas ! Ne jugez point, mes frères ! Baisez en paix ! (p194-195)

Dans une société où la pédophilie serait jugée « normale », les enfants se structureraient-ils tout autant, mais autrement , Y seraient-ils acceptés comme « normaux », sans souffrance particulière ? (p246)

La pédophilie constitue l’exemple ultime pour tester le relativisme culturel… (p247)

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