Vers le pré et au-delà

Il y a cette émission de téléréalité à laquelle j’avais jusque-là réussi à échapper. D’un autre côté c’est facile, je ne regarde pas vraiment la TV de manière générale et les seules exceptions à la règle en matière de téléréalité française sont au nombre de trois : Koh Lanta (et croyez-moi, je suis grave en deuil jusqu’en 2014), Masterchef et Top Chef. Sauf si les diffusions sont trop rapprochées, auquel cas, je suis en overdose avancée et je pars faire autre chose de mes soirées. Pour tout le reste, je vois passer de temps en temps des extraits dans le zapping et ça finit de me convaincre des fois que j’aurais un doute que j’ai bien raison de m’abstenir de perdre mon temps. J’ai donc découvert par hasard cet été l’Amour est dans le pré. Je ne dénoncerai pas la personne par laquelle cet exploit est arrivé. Mais j’ai bel et bien « vu » UN épisode complet, que je ne me suis pas privée de commenté acerbement en live.

Pour être honnête, je n’étais pas vraiment devant la télé, mais plutôt sur le PC pas loin, sans doute en train de me tuer un neurone ou deux à Candy Crush Saga. J’avais le son, et l’image seulement quand je levais le nez de temps en temps, attirée par un pleur ou une niaiserie quelconque prononcée à haute voix. Pour préserver ma santé mentale, j’ai bien sûr pris la précaution de ne retenir aucun visage, aucun nom et de ne surtout associer aucun des uns avec aucun des autres. Je suis donc bien incapable de raconter ce qu’il s’est déroulé exactement, même si… OK, la nymphomane mythomane psychopathe, j’ai retenu ; elle était fantastiquement flippante. Je ne sais toujours pas comment elle s’était retrouvée là, une erreur de casting probablement, ou alors c’était l’idée du quart d’heure de gloire qui l’a motivée à pipeauter pour participer, ou l’hôpital dont elle s’est échappée qui n’a pas fait son boulot. Bref, elle, elle était assez gratinée pour marquer ma mémoire.

Par contre, pour tous les autres, je ne comprends pas. Enfin si, mais non. Je sais que la téléréalité ne date pas d’hier. J’étais même au rendez-vous du premier Loft Story, et j’ai suivi la Star Ac’ plusieurs années de suite. Depuis, je suis passée aux télé-crochets US, parce que le fric, ça change vraiment tout. Et Simon Cowell aussi. Surtout Simon.

Je peux admettre que certains voient de la lumière et se sentent obligés de venir s’y exposer. Grand bien leur fasse si montrer leur cul à la France entière leur apporte une vague sentiment de fierté. Pour sur, nous n’avons pas les mêmes valeurs. Mais, aujourd’hui, l’Amour est dans le pré me dépasse encore plus qu’un Secret Story ou un Les anges de la téléréalité (qui fait ramasse poubelle de tout le reste, un must à n’en pas douter). Parce que, franchement, tous ces agriculteurs et éleveurs ont l’air de gens bien, du peu que j’en ai vu en tout cas. Et qu’en a donc fait la télé ? Des proies faciles pour un spectacle qui est fondamentalement triste et qui fait croire qu’il apporte le bonheur dans le pré alors que, soyons sérieux une seconde, tout le monde sait que le bonheur est dans le porte-monnaie de l’annonceur. Alors certes, certains trouvent l’amour à la fin (il paraît, je n’en serai jamais témoin), M6 peut se targuer de faire dans le social comme ça, bravo !, mais entre temps les candidats auront exposé leurs larmes, leur désarroi, leur romantisme maladroit (que je qualifierais de tarte. Il faut dire qu’il n’y a pas 15 jours, on me proposait une soirée romantique pour admirer un coucher de soleil dans une zone SEVESO, excusez du peu !), leur fragilité dans les bons comme dans les mauvais moments. Je ne trouve pas ça touchant, je trouve ça triste d’en arriver là. A quel point faut-il être désespéré pour vouloir volontairement exposer sa vie intime devant les caméras comme ça ? A moins que ce besoin d’exhibition soit le véritable moteur et que le reste ne soit qu’un prix à payer pour un moment de pseudo-célébrité ? Mais j’en doute dans ce cas précis. Ce qui ressort de tout ça, c’est une impression de solitude. Celle de ceux qui vivent isolés dans leur campagne ou ailleurs et sont incapables de nouer des liens autour d’eux. Le grand paradoxe de notre monde moderne ultra connecté. Mais aussi la solitude de ceux qui regardent et qui cherchent des pairs, des êtres plus malheureux qu’eux ou juste une idée du rêve qui redonne vie à un espoir éphémère. Merveilleux monde de la téléréalité, je ne sais pas qui est le plus cynique de toi ou de moi. Je continuerai de regarder Koh Lanta, non pas pour la beauté du jeu, mais pour les saloperies que les uns feront aux autres. Je continuerai de regarder Masterchef et Top Chef non pas pour avoir des envies de cuisiner, mais pour les moments où le candidat et son pâté en croute se feront démolir par un chef ou un critique culinaire. (Ghislaine Arabian rules!). Mais L’Amour est dans le pré et moi, ça ne sera jamais possible. Je n’ai même pas goût à me moquer de tes candidats.

3 commentaires pour “Vers le pré et au-delà

  1. Le plus triste est surtout le côté dernière chance pour certains. Et quand les deux erreurs de casting reprennent leur train, le type fond en larmes car il sait que globalement il en reprend pour 10 ans de soirées à mater le coucher de soleil sur son champ qui pue l’engrais avec la rivière au fond plein de nitrates. Tournez manège plus élaboré. Si seulement il y avait un Charlie Oleg pour mettre un peu de musique (et pas des samples de moins de 10 secondes pour éviter les droits d’auteur).

  2. C’est presque fini, je persiste et signe même si je suis d’accord avec quelques-uns de tes arguments et, Zap, rien à voir avec « Tournez manèges » ! il y a bcp plus à voir, entendre, conneries et bluettes comprises, na 🙂

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